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Data Emploi, la nouvelle plateforme data de Pôle Emploi – Quels usages pour les branches professionnelles ?

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Data Emploi, la nouvelle plateforme data de Pôle Emploi – Quels usages pour les branches professionnelles ?

Lancée le 13 septembre dernier par Pôle Emploi, la plateforme Data emploi regroupe de multiples données pour faciliter l’analyse du marché de l’emploi à l’échelle nationale et territoriale. Derrière l’ambition affichée de « Décrypter pour décider », Pôle Emploi a présenté trois cas d’usage :

  • Une élue locale souhaitant comprendre la situation de son territoire et améliorer les actions de formation ;
  • Un responsable des actions de développement cherchant à aider une entreprise à s’implanter dans sa région ;
  • Une conseillère Pôle Emploi accompagnant les demandeurs d’emploi dans leurs recherches et projets professionnels.

Toutefois, un acteur essentiel du champ de l’emploi-formation n’apparaît pas parmi ces cas d’usage : les branches professionnelles. Si l’action de Pôle Emploi et ses outils sont évidemment conçus et tournés vers les demandeurs d’emploi, dans quelle mesure les branches professionnelles, pourraient-elles se saisir de Data Emploi pour appuyer leurs actions ?

LES DONNEES ACCESSIBLES SUR LA PLATEFORME DATA-EMPLOI

Après la publication de Data Emploi, KYU Associés s’est attaché à explorer ses fonctionnalités et les données accessibles. La plateforme offre ainsi plusieurs entrées :

  1. Un panorama complet du marché de l’emploi à la maille territoriale et des données relatives :
    • Au taux de chômage et au dynamisme de l’emploi
    • Aux principaux secteurs d’activité et à leurs embauches
    • Aux demandeurs d’emploi et à leurs profils (sexe, âge, métiers recherchés…)
    • A l’évaluation de l’adéquation entre les demandeurs d’emploi et les offres des recruteurs
    • Aux métiers les plus recherchés et à leur niveau de tension au recrutement
    • Aux compétences les plus détenues et les plus recherchées
    • Aux formations et à l’accès à l’emploi des demandeurs d’emploi
  2. Une analyse croisée des demandeurs d’emploi et des offres d’emploi et des données relatives :
    • Aux difficultés de recrutement par métier
    • A l’évolution croisée du nombre d’offres d’emploi et de demandeurs d’emploi
    • A l’évaluation de l’adéquation des profils entre les demandeurs d’emploi et les offres diffusées par les recruteurs
  3. Une analyse spécifique des métiers et des données relatives :
    • Aux métiers les plus recherchés par les demandeurs d’emploi et les recruteurs
    • Aux compétences nécessaires pour exercer ce métier et à l’évaluation de leurs tensions au recrutement
  4. Une analyse spécifique des compétences et des données relatives :
    • Aux compétences les plus détenues et les plus demandées sur un territoire
    • Aux métiers partageant une même compétence et donc aux mobilités professionnelles envisageables
    • Aux mobilités géographiques envisageables
  5. Une analyse spécifique des formations des demandeurs d’emploi et des données relatives :
    • Aux domaines et champs des formations suivies par les demandeurs d’emploi
    • A l’accès à l’emploi des demandeurs d’emploi ayant suivi une formation
    • Aux profils des bénéficiaires de formations (niveau de diplôme, d’expérience…)

LES USAGES POUR LES BRANCHES PROFESSIONNELLES 

Pour identifier les différents usages possibles des branches professionnelles, il est nécessaire de revenir à leurs missions et prérogatives. Les branches professionnelles « regroupe[nt] les entreprises d’un même secteur d’activité et relevant d’un accord ou d’une convention collective » et sont animées par les « organisations syndicales d’employeurs et les organisations syndicales de salariés représentatives » (source : Ministère du Travail, du plein emploi et de l’insertion). Elles interviennent en particulier sur les thèmes des classifications, des salaires minima, de la formation professionnelle, de la prévoyance, de la pénibilité et de l’égalité femme/homme. Leurs actions sont donc majoritairement tournées vers les salariés déjà en emploi. Après analyse des données disponibles du Data Emploi, les branches professionnelles pourraient s’emparer de cet outil dans l’optique :

  1. D’approfondir leurs connaissances des territoires :
    • A l’instar de l’élue locale les branches professionnelles peuvent s’emparer de cet outil pour mieux comprendre la situation générale des territoires. Data Emploi permet alors de contextualiser l’activité des entreprises d’une branche dans un panorama économique plus global.
    • Les branches peuvent également mesurer rapidement la tension au recrutement qui existe sur les métiers couverts par les activités de leurs entreprises et de leurs salariés.
  2. De guider le déploiement de leurs actions:
    • L’analyse territoriale permet de prioriser les territoires à adresser en fonction des tensions sur un métier (organisation de salons, partenariats avec des écoles, etc.).
    • Data Emploi peut également être mobilisée dans le cas d’actions territoriales interbranches à travers l’identification de métiers communs et d’actions communes et mutualisables sur un territoire.
  3. D’identifier les passerelles de mobilité
    • Les passerelles entre les métiers au sein d’un territoire est un sujet particulièrement stratégique pour les branches professionnelles afin de faciliter la mobilité intra et inter branche des salariés.
  4. De mesurer la concurrence au recrutement
    • Une des difficultés des branches réside parfois dans la concurrence au recrutement exercée par d’autres secteurs d’activité. Data emploi permet d’identifier les secteurs qui embauchent également sur un métier déjà en tension.

LES LIMITES DE L’OUTIL POUR LES BRANCHES PROFESSIONNELLES 

En revanche, cet outil ne s’adressant pas directement à elles, l’utilisation de Data Emploi par les branches professionnelles demeure limitée par plusieurs éléments.

  1. Les mailles choisies diffèrent de celles utilisées par les branches professionnelles
    • Alors que la maille sectorielle proposée par Data Emploi est relativement grosse (Naf 21 et Naf 88), les branches professionnelles requièrent une maille sectorielle plus fine (Naf 732 croisée avec les IDCC de la DADS). En effet, les tendances d’emploi et d’activité peuvent fortement différer au sein d’un même secteur entre une branche professionnelle et une autre à l’image des activités du transport routier de voyageurs, du transport routier de fret, du transport ferroviaire de voyageurs et du transport ferroviaire de fret toutes comprises dans la large catégorie « Transports terrestres et transport par conduites ».
    • Si la maille métier est pertinente, le caractère transverse des codes ROME et l’impossibilité de les croiser avec les secteurs d’activité estompent les différences d’activités et de compétences qui existent au sein d’un même métier en fonction des différents secteurs où il peut exercer. C’est notamment le cas pour la ROME « installation et maintenance d’équipements industriels et d’exploitation » dont les métiers peuvent être relativement éloignés entre le secteur de l’électronique et le secteur de la plasturgie par exemple compte tenu de la différence entre les appareils de production.
  2. Le poids donné au nombre d’offres d’emploi publiées :
    • Les offres d’emploi ne sont pas équivalentes à des embauches effectives, la comparaison du nombre de demandeurs d’emploi et du nombre d’offres d’emploi est donc fragile. Un nombre d’offres d’emploi supérieur à celui de demandeurs d’emploi n’est donc pas synonyme de tension au recrutement – d’autres facteurs entrant en jeu (volonté de reconversion des demandeurs d’emploi, inadéquation géographique…). L’analyse de la dynamique des offres d’emploi est donc plus pertinente pour évaluer les tendances sur le marché de l’emploi.
    • Les offres d’emploi publiées ne sont pas toutes de qualité suffisante. La CGT mène ainsi une enquête sur la qualité des offres d’emploi publiées qui révèle qu’un grand nombre de ces offres sont incohérentes, incomplètes voir pour certaines illégales (note : si Pôle Emploi a contesté les conclusions de l’étude de la CGT relatives à l’illégalité de certaines offres, la question de la qualité des offres demeure).
    • L’impossibilité de croiser les offres d’emploi avec les secteurs d’activité peut masquer les différences profondes qui existent au sein d’un métier entre plusieurs secteurs. Par exemple, l’un des codes ROME les plus recherchés par les demandeurs d’emploi et par les recruteurs est « Assistance auprès d’enfants ». Or les situations (dynamique de recrutement, compétences demandées, conditions d’emploi…) sont très différentes entre une école maternelle, une crèche publique, une crèche privée ou encore du baby-sitting.

Il apparaît ainsi que la plateforme Data Emploi peut être un outil supplémentaire de connaissance du marché du travail pour les branches professionnelles. Toutefois, compte tenu de son prisme initial, cet outil ne permet pas de répondre à l’ensemble de leurs problématiques du fait d’une maille sectorielle trop large et de l’impossibilité de contextualiser les métiers en fonction des secteurs d’activité dans lesquels ils s’exercent.

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