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Analyser les impacts de l’IA sur les métiers de la prestation intellectuelle

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Analyser les impacts de l’IA sur les métiers de la prestation intellectuelle

La Commission de l’intelligence artificielle a remis à Emmanuel Macron, le 13 mars, son rapport « IA : Notre ambition pour la France ». Ce rapport, proposant un plan d’action pour faire de la France un pays à l’avant-garde en matière d’IA, témoigne de l’effervescence intellectuelle qui caractérise ces dernières années.

Un écosystème IA en pleine structuration

La France elle-même, n’en est pas à sa première réflexion sur le sujet : le rapport de la mission Villani (2018) prédisait déjà d’importantes transformations du travail. Une stratégie nationale pour l’intelligence artificielle a été définie, ainsi qu’un comité de l’intelligence artificielle générative pour l’appliquer. Néanmoins, il a jusqu’à maintenant été difficile pour les législateurs d’anticiper les évolutions rapides de l’IA. Le récent vote par le Parlement Européen d’une loi encadrant l’intelligence artificielle illustre cette volonté institutionnelle d’encadrer les pratiques sans pour autant entraver l’innovation.

Le développement de l’intelligence artificielle ouvre en effet de nombreuses portes, en particulier pour les métiers de la prestation intellectuelle : nouveaux marchés à conquérir, nouveaux positionnements stratégiques, potentiels gains de productivité et gains économiques… Mais elle est entourée d’un certain flou et suscite donc des craintes liées aux risques que son développement entraîne : risques déontologiques et éthiques (touchant les métiers du journalisme, les avocats, le conseil…), risques juridiques (détermination de la responsabilité en cas de dommage causé par l’IA, propriété intellectuelle…), problématiques en termes de sécurité des données, manque de transparence des sources, existences de biais et de censures dans les modèles d’IA…

Une évolution à marche forcée des métiers de la prestation intellectuelle

Les acteurs publics et privés tentent donc de se mettre à la page tandis que de nouvelles structures apparaissent sur le marché de l’intelligence artificielle, pour se positionner sur cette niche encore peu exploitée. De plus en plus de branches professionnelles s’interrogent sur la place que va prendre l’IA dans leurs pratiques : conseil, journalisme audiovisuel, industries culturelles…. « Ce qui est nouveau avec l’IA générative, c’est que certains métiers de la connaissance, de la stratégie et de la créativité (médecins, enseignants, avocats, journalistes, artistes…), autrefois perçus comme des creusets de l’intelligence humaine, pourraient être concernés par une réduction du nombre total d’emplois » (Source 1) .

Des analyses se penchent ainsi sur la question des impacts de l’IA, pour comprendre la manière dont les métiers vont évoluer et les actions à mener pour profiter des opportunités qu’elle engendre, tout en contournant ses risques. L’impact de l’IA sur le volume d’emplois (et donc les potentielles pertes que son essor engendre) est l’un des effets les plus relayés par les médias. Mais ce développement entraînera des conséquences sur le type de tâches réalisées par les travailleurs et donc également sur les compétences à mobiliser.

L’utilisation de l’IA génère deux types de répercussions sur l’emploi : l’effet d’éviction (le déplacement de certaines tâches du travail humain aux machines, on supprime des tâches en automatisant) et l’effet de productivité (l’utilisation de l’IA permet d’augmenter la productivité, augmentant ainsi le rapport qualité/prix des produits commercialisés, la demande de ces produits devient plus élevée, entraînant plus d’embauches et la création de nouvelles tâches).

Selon le rapport de l’OCDE (2023) (Source 2) , l’IA est déjà capable d’effectuer de nombreuses tâches, en reproduisant en particulier des compétences cognitives et manuelles, jusqu’à présent considérées comme difficiles à réaliser par les technologies. Néanmoins, même si de nombreuses tâches des professions intellectuelles pourront être répliquées par l’IA (rédaction, traduction, synthèse, mise à jour automatique…), elle accroîtra également, la demande en compétences techniques nécessaires à la conception, à la maintenance et à l’utilisation des systèmes d’IA. Des compétences transversales devront également gagner en importance : raisonnement critique, créativité, et capacités à créer du lien social avec ses interlocuteurs (équipe, clients/patients, partenaires…).

Il paraît aujourd’hui nécessaire d’entamer des analyses à des niveaux sectoriels pour détecter de façon plus précise quels seront les effets de l’IA sur les différents métiers.

Quelles méthodologies d’études pour aborder ces thématiques ?

Des incertitudes surviennent fatalement lors de l’étude des impacts de technologies sur l’emploi car il est très difficile de prédire le rythme de développement d’innovations. L’IA en est un exemple typique puisque sa progression ne suit pas un rythme linéaire : elle s’est développée relativement lentement pendant 50 ans puis a connu une accélération importante depuis les années 2000, et en particulier ces dernières années avec l’essor de ChatGPT et l’accessibilité aux systèmes d’IA pour le grand public.

Alors comment anticiper les impacts de l’IA sur les métiers, et en particulier sur les métiers de la prestation intellectuelle ?

  • Puisque le développement de l’Intelligence Artificielle affecte spécifiquement certaines tâches, il est judicieux d’évaluer les tâches affectées pour chaque métier, et donc les conséquences en termes de compétences requises pour les réaliser. Quantitativement, certains économistes associent à chaque tâche une probabilité d’être remplacée par l’IA. La limite de cette méthode est qu’elle analyse uniquement les tâches existantes, et ne peut pas prendre en compte celles qui seront créées à la suite du développement de l’IA.
  • Comme il est de rigueur dans la majorité des analyses prospectives, il est pertinent d’examiner les évènements passés pour anticiper le futur. Ainsi, il est possible de tirer des hypothèses d’évolution et d’extrapoler des scénarii en interrogeant des structures ayant déjà intégré l’IA. Des monographies de ces structures peuvent être réalisées en prenant en compte le point de vue de toutes les parties prenantes : dirigeants/RH comme salariés. En effet, les dirigeants seuls n’ont pas toujours la connaissance exhaustive des outils utilisés par leurs salariés. Ces derniers ont parfois recours aux outils d’IA de façon non-encadrée. Cela se vérifie dans les métiers de la prestation intellectuelle. Ceux-ci jouissent souvent d’une certaine autonomie dans leur vie professionnelle et peuvent donc être plus enclins à expérimenter avec de nouveaux outils et technologies, surtout lorsqu’il s’agit d’outils leur permettant de décomplexifier certaines de leurs tâches et d’améliorer leur efficacité.
  • De la même façon, pour anticiper les effets de l’IA sur les métiers, une analyse comparative d’autres secteurs, ainsi que de pays plus avancés sur le sujet peut nous apprendre beaucoup, même si de nombreux biais peuvent peser dans la balance. Cette méthode comporte également une limite : le manque de recul temporel.
  • Pour imaginer ces impacts à plus long terme il paraît indispensable d’interroger les premiers concernés : les éditeurs de solutions d’IA. Ces acteurs experts apportent la connaissance des technologies en cours de développement, et qui seront implémentées dans les prochaines années.

Ces approches constituent une base solide pour examiner les évolutions actuelles sur le marché de l’emploi. Il est néanmoins crucial de ne pas seulement se concentrer sur les chiffres alarmants concernant de potentielles pertes d’emploi, mais également d’analyser les effets que le développement de l’IA aura sur les conditions de travail, la manière de travailler et le rapport au travail.

Chiffres clés

  • Seuls 5% des emplois français seraient menacés par l’IA (Source 1)
  • 74% des entreprises qui recourent à l’IA estiment un impact positif sur l’évolution des compétences (Source 3)

 

Sources :

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